Une plongée inhabituelle

Publié le 21 Février 2015

Vendredi 20 février et samedi 21 février 2015 : 2 jours de plongées aux Farasan Bank, le meilleur site de plongée d’Arabie Saoudite (Entre Jeddah et la frontière du Yemen).

A cette période de l’année, ce spot est surtout connu pour ces requins marteaux, ces requins tant recherchés par les plongeurs.

Le programme consiste à se retrouver sur le bateau le 19 au soir. Comme toute sortie hors de la ville on part par petits groupes de plusieurs fois. Nous (Mes 2 colocataires + moi) sommes les derniers et faisons groupe avec une autre voiture.

Comme toute sortie hors de la ville, une personne dans le groupe est équipée d’un téléphone satellite (complètement inutile sauf en cas de gros pépin … qui n’arrivent jamais bien sûr).

On arrive sur place, avec un peu de bouffe et de boissons locales, l’ambiance est tiptop, on rigole et on annonce qu’il va y avoir un peu de vent. La dernière fois on en avait eu un peu plus, donc pas de problème.

Comme la dernière fois, je dors sur le pont, tout se passe bien, et le bateau démarre le 20/03 à 06h00 du port pour rejoindre le premier spot de plongée à 2h de navigation.

la masse verte informe sous la couette, c'est moi. Un régal de dormir sur le pont .... d'habitude

la masse verte informe sous la couette, c'est moi. Un régal de dormir sur le pont .... d'habitude

On nous donne du café, etc etc … comme ça bouge un peu, je vomis tout, jusque-là rien d’anormal.

On y arrive, on s’équipe et plouf, première plongée. Nickel, on a vu des petites choses sympas (thons, raies, murènes, perroquets, …) on s’est fait une petite profonde à 40m, que du bon.

On fait le petit déj, on re navigue pendant une heure, re plouf, re belles, choses : nickel.

On remonte, on fait le repas du midi et on décide du prochain lieu de plongée. Là on décide que les 2 suivantes (celle de l’après-midi et la plongée de nuit), vont sur le même spot que celui qu’on vient de faire. On nous annonce que la météo n’est pas top du tout et que si on veut rejoindre le fameux spot à marteau, c’est la meilleure option.

Donc on se rééquipe, et on replonge. Encore de très belles choses (Napoléons, perroquets à bosse, raies pastenagues, …) le tout en quantité ; Nickel !

Arrive le soir, personnellement je passe mon tour, il commence à faire froid et je veux être en top forme pour LE spot des requins marteaux. Des courageux y vont quand même

les plongeurs de nuit!

les plongeurs de nuit!

On se vautre dans le salon du bateau, on matte un film, on rigole bien, super ambiance.

 

Je vais au lit (comprendre sur le pont). Et là ça commence ….

Le temps se dégrade et ça souffle plus. Pas grave, la dernière fois ça soufflait plus. En plus le ciel était magnifique.

Puis, le temps se dégrade et ça souffle plus. Pas grave, mais ça va pas être top.

Puis, le temps se dégrade et ça souffle plus. Bon ok, je vais passer une nuit de merde …

Puis, le temps se dégrade et ça souffle plus. Bon là ça commence à faire chier.

(Vers 5H du mat) Puis, le temps se dégrade et ça souffle plus. Et là j’entends l’équipage hurler dans tous les sens et courir partout.

 

A ce moment-là on ne sait pas trop ce qu’il se passe, mais on sent que ça pue pour la super plongée. Je descends au salon et je vois tous les plongeurs debout.

Moi : « mais qu’est-ce que vous faites ? »

Le leader : « Ben dans le cas où ça se dégraderait franchement plus, il vaut mieux qu’on soit tous sur le pont qu’enfermé dans nos cabines ».

Je me dis qu’il en rajoute, mais qu’il vaut mieux prévenir que guérir.

 

Puis là on apprend que le bateau qui était attaché par 3 amarres sur des bouées n’en a plus qu’une d’attachée.

Donc ok, là le but du jeu est de se détacher et de se barrer. Ca souffle un peu moins, on peut profiter de l’occasion pour partir.

 

(le soleil s’est levé entre temps)

 

Il se détache et démarre …

Ça démarre mais ça bloque rapidement.

Il force.

On entend un gros craquement => les 2 bouts se sont enroulés sur les 2 hélices. (Oui le capitaine a été un peu rapide de démarrer alors qu’il n’avait pas rentré les amarres qui s’étaient détachées et ça n'a pas été une bonne idée de forcer)

L'équipage manoeuvre
L'équipage manoeuvre

L'équipage manoeuvre

Un membre d’équipage s’équipe et va voir sous l’eau.

Il constate que c’est fortement emmêlé et qu’un moteur a pêté.

Il essaye de couper tout ça à la scie. Comme ça bouge beaucoup, le gus se fait assommer par le bateau sur le passage d’une vague. Il remonte, la réparation est impossible.

 

Super, on est bloqué à plus de 3h heures du rivage (enfin, on a navigué pendant 3 h pour atteindre ce spot mais on n'était pas à fond et on a fait pas mal de détour. La réalité est qu'on est à 1h30 du rivage, mais ça on ne le sait pas), sans manœuvre possible et complètement détaché pas loin d’un récif qui nous a servi de spot de plongée ….

En dessous des coraux à 15 mètres et très vites après un tombant à plus de 70 mètres.

 

L’équipage repart à l’eau et rattache le bateau à la bouée. Il double le lien (je vous la fait court mais ça dure un moment).

Le capitaine appelle à la radio les garde côtes pour :

  • Annoncer qu’on a un problème,
  • Nous localiser
  • Venir nous chercher.

Personne ne répond. En fait, c’est ce qu’il dit, mais on s’est rendu compte surtout une heure plus tard, que la radio était morte.

Donc je répète 3h heures du rivage, sans manœuvre possible, pas loin d’un récif, pas de radio (personne ne sait où on est, personne ne sait qu’on est en détresse)….

 

Ok le leader de notre groupe nous demande de nous équiper avec nos combis de plongée (pour les plongeurs), de nous mettre un gilet de sauvetage. Certains s’équipent de leur stab (gilet qui peut faire bouée). Grosso modo on reste calme mais l’ambiance est très tendue.

 

Et là, BIM !!! on heurte le récif. Juste à ce moment une vague nous prend de côté et le bateau commence à chavirer. Dans le schéma ci-dessous, le rectangle représente le bateau vu de derrière. Le point rouge, moi.

le schéma c'est le chavirage du bateau, à droite, c'est le salon un peu rangé après le chavirage
le schéma c'est le chavirage du bateau, à droite, c'est le salon un peu rangé après le chavirage

le schéma c'est le chavirage du bateau, à droite, c'est le salon un peu rangé après le chavirage

L’angle n’est pas exagéré. Le chavirage a été assez lent pour que je reste plaqué contre le sol. En attendant, j’ai glissé et je me suis pris l’autre côté du bateau exactement comme si je fais une chute de 3 mètres. Je me suis éclaté contre la rambarde du bateau. Je me voyais déjà dans l’eau, mais non.

Le bateau s’est alors remis à la normale.

Je n’ai jamais autant flippé de toute ma vie.

 

Par une chance incroyable, personne n’a été blessé à ce moment-là. A l’intérieur du bateau, tout est défoncé, les sièges et tables bons marchés sont explosés, le matériel est éparpillé, tout ce qui trainait sur le pont est maintenant par 60 mètres de fond.

 

Certains ont hurlé, une personne a gueulé des prières, la plupart sont restés calmes tout en cherchant à se rattraper. Moi je n’ai pas réussi à me rattraper.

 

Là on ne joue plus et l’ambiance devient ultra tendue. Tout le monde pense aux histoires de plongeurs qu’on s’est racontées la veille, sur des cas où des gens ont été oubliés et ont préféré se suicider plutôt que de souffrir d’une mort lente, ou celles de naufrages qui ont mal tournés, …

 

Finalement, la personne qui a pris le téléphone satellite a réussi à joindre la structure de plongée et leur signaler :

  • Notre détresse
  • Notre position exacte.

 

Le temps se calme et redevient presque « normal ».

 

Au bout d’une demi-heure, on nous annonce que les gardes côtes nous envoient 2 bateaux.

Le temps passe (une demi –heure est très long dans ces cas), on nous annonce qu’ils seront là dans 1h30.

 

On commence à préparer les bagages, tout le matériel de plongée est rangé, les affaires sont rangées dans des petits sacs.

 

Les gardes côtes arrivent et …. Ha mais non ce n’est pas les gardes côtes mais 2 petits bateau de plongée. On est médusé. Bien sûr, on ne s’attendait pas à 2 porte-avions, mais pas ça !

 

Bon ok, c’est quand même des secours, donc on ne râle pas. A ce moment-là l’ambiance se détend et on recommence à sortir des blagues.

Le croiseur qui devait nous sauver est finalement un petit bateau de plongeur.

Le croiseur qui devait nous sauver est finalement un petit bateau de plongeur.

Là le premier s’approche vite, très vite, trop vite et BIIIM il cogne violemment notre bateau. MAIS PUTAIN QU’ILS SONT BOURRINS !!!

Au final, plusieurs tentatives d’amarrage ont été tentées et toutes ont échoué. On décide d’utiliser le zodiac.

Comme ils le manœuvre comme des bourrins, 2 personnes de notre groupe décident de prendre le relai avec l’aide d’un membre d’équipage. Petit à petit, on remplit les 2 bateaux avec nous et nos petites affaires (pas le matériel de plongée).

 

Je vous épargne les sketchs du remplissage des bateaux et de la fatigue générale (surtout celle de l’équipage).

 

On dit au mec qui pilote notre bateau de secours « et l’équipage ? » réponse : « on s’en fout se sont des philippins » et démarre.

 

(en fait, on avait discuté avec l’équipage et il nous avait dit que eux resteraient pour réparer le bateau quand ça sera vraiment calme. Notre question était hypocrite mais la légèreté du mec était effrayante).

Une ambiance plus détendue

Une ambiance plus détendue

Au final au bout d’1h30, on revient à quai sain et sauf … et sans nos bagages.

 

En ce qui me concerne :

  • Je n’ai pas mes affaires de plongées,
  • Je n’ai pas ma couette
  • Je n’ai pas mon manteau  (le retour en France va être très froid).

 

Mais je m’en fiche, je suis sain et sauf et j’ai mon passeport pour rentrer en France. Mes affaires de plongées seront ramenées par un collègue quand il reviendra en France.

 

Une fois arrivée, on a tous pris ça avec philosophie et on s’est fait un super gueuleton dans un « restaurant » du coin. Un moment fort convivial où tout le monde parlait en boucle de cet événement et de comment il l’avait vécu.

Dernier repas avec les copains de Jeddah

Dernier repas avec les copains de Jeddah

Beaucoup de personne m’ont « plaint » pour ma dernière plongée à Jeddah, je leur ai dit que ce n’était pas grave, car comme vous le savez chers lecteurs, finalement ce n’est que la continuité de mes péripéties saoudiennes :)

 

Ma monitrice avait prévu de m’offrir un cadeau qu’elle avait heureusement oublié dans sa voiture. Cette super photo du groupe de plongeur au moment de son mariage sera certainement l’un de mes meilleurs souvenirs de Jeddah.

Rédigé par David

Publié dans #plongée

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